Le secteur des services financiers connaît l’une des plus fortes hausses des fraudes. Les fraudeurs modernes peuvent facilement créer des identités synthétiques pour exploiter les systèmes numériques. Les hypertrucages sont de plus en plus réalistes et parviennent même à duper des gens au téléphone ou dans un appel vidéo. Si vous croyez que les fraudes ne sont commises que par de mauvais acteurs opportunistes à la recherche d’un gain financier rapide, détrompez-vous. Un nombre croissant de personnes compétentes, éduquées et professionnelles choisissent la fraude en guise de carrière lucrative à temps plein.

L’inaction coûte très cher. Les institutions financières qui n’agissent pas rapidement lorsqu’une fraude est détectée peuvent subir de graves sanctions, notamment des amendes élevées et des atteintes à leur réputation. Même petits et isolés, les incidents de fraude peuvent faire disparaître les profits en nécessitant des mois d’efforts dispendieux pour la production de rapports et la mise en place de mesures de correction.

La plupart des entreprises rêvent encore du piège parfait, un produit qu’elles inséreront dans leurs systèmes pour repérer et arrêter une fraude à venir. Nous avons travaillé avec de nombreux clients pour sélectionner, intégrer et activer des produits de prévention tiers. Il s’agit bien sûr d’une approche qui peut être très profitable. Cela dit, un produit ne peut traiter que ce qui a déjà existé, et la fraude évolue constamment. Afin de réellement inverser la tendance, les entreprises doivent adapter à la fois la technologie et le comportement humain. Elles doivent aussi être en mesure d’exploiter l’IA pour comprendre rapidement la situation et ses facteurs sous-jacents, dans le but de pouvoir continuer à s’adapter.

Nous croyons que les sociétés de services financiers peuvent réduire la fraude de 50 % à 90 % en trois ans, tout en améliorant la détection et en diminuant le nombre de transactions légitimes bloquées par erreur. La mise en œuvre de systèmes adaptatifs et globaux combine l’apprentissage automatique pour repérer les fraudes potentielles avec des assistants basés sur de grands modèles de langage (GML) qui accélèrent la prise de décisions et de mesures. L’explicabilité est la clé, et les données synthétiques ajoutent un levier supplémentaire pour peaufiner les modèles.

La pression réglementaire sur les institutions financières devrait diminuer en 2025, après être montée en flèche depuis la faillite de la Silicon Valley Bank au début de 2023. En parallèle, l’examen fondamental du portefeuille de négociation (Fundamental Review of the Trading Book ou FRTB) constitue le plus grand changement réglementaire en matière de vente en plus de vingt ans. Il s’agit d’une révision générale complète du cadre régissant les risques de marché, dont la mise en œuvre par les pays se poursuivra en 2025 et en 2026.

Les priorités réglementaires dépassent largement les mandats divulgués, comme ceux du FRTB et de Bâle. Les dirigeants financiers sont confrontés à une panoplie d’examens plus pointilleux dans tous les secteurs : de la protection du consommateur et la cybersécurité à la liquidité, au crédit et à la gestion de risques des tiers. La confidentialité des données, la sécurité de l’information, les contrôles infonuagiques et l’informatique d’utilisateur final sont aussi visés par la Réserve fédérale américaine, l’Options Clearing Corporation (OCC) et l’Office of Financial Stability du département du Trésor américain, en plus d’être reflétés dans les audits du Federal Financial Institutions Examination Council (FFIEC).

Chaque nouveau changement ou défi nécessite une urgence d’agir, ne serait-ce que pour rester en affaires, mais les dirigeants futés privilégient une vue globale, afin de bâtir des programmes de modernisation qui favorisent la gestion efficace de tous les types de risques. En fait, de nombreuses entreprises sont au beau milieu de leur feuille de route pluriannuelle de modernisation. Si la réglementation s’apaise réellement en 2025, ces entreprises seront tentées de conclure rapidement ces feuilles de route afin d’investir ailleurs. Des accélérateurs puissants sont fort utiles.

L’intérêt majeur pour la modernisation consiste à simplifier les applications et les infrastructures, tout en centralisant les données. Les applications spécialisées, comme les plateformes de gouvernance, de risques et de conformité et celles de lutte contre le blanchiment d’argent, sont remplacées afin d’intégrer leurs cas d’utilisation dans les outils des entreprises. Le retrait d’applications réduit les dépenses liées aux licences, la complexité, les copies redondantes des portefeuilles d’intermédiation bancaire et les zones d’exposition qui nécessitent des contrôles excessifs.

Une structure opérationnelle solide, alimentée par l’IA, améliore l’expérience globale des clients et crée une organisation plus agile et réactive. Elle pourrait même mener à la transition d’un centre d’appels alimenté par l’IA en un centre de ventes proactif. Cela changerait considérablement la façon dont les institutions financières interagissent avec la clientèle.

Les sociétés de services financiers continueront d’améliorer leurs opérations à l’aide de l’IA en 2025, que ce soit en soutenant les conseillers financiers avec l’IA générative ou en offrant des solutions modernes de négociation qui proposent des capacités avancées d’analytique jusqu’à 60 fois plus rapides tout en réduisant le coût total d’acquisition du système. Avec la confiance accrue dans les systèmes alimentés par l’IA, l’attention se porte désormais sur de nouveaux cas d’utilisation orientés sur le client, notamment en fournissant des conseils et des services conçus précisément pour les clients, en temps réel.

L’adoption accélérée de la monnaie numérique alimentera le potentiel des agents d’IA, en intégrant une capacité d’effectuer des transactions numériques transparentes dans une gamme d’applications alimentées par l’IA. Avec l’ajout des monnaies numériques dans les agents d’IA, les transactions peuvent être automatisées et optimisées en temps réel à l’échelle des secteurs – de la finance au service à la clientèle et plus encore. Les agents d’IA pourraient de façon autonome gérer des paiements, traiter des règlements et s’occuper de transactions numériques complexes, afin de créer un écosystème dynamique qui permet des interactions plus personnalisées à l’aide des données. Cette évolution aurait pour effet d’augmenter considérablement l’efficacité et de libérer de nouvelles sources de revenus, puisque les agents d’IA dotés de capacités transactionnelles feront continuellement le pont entre les actifs numériques et les services financiers traditionnels, en améliorant l’utilité et les retombées des deux technologies.

L’IA continuera d’être le sujet de l’heure en 2025, mais les organisations ne doivent pas perdre de vue le portrait global. L’adoption graduelle, les tests minutieux et la gestion du changement sont essentiels pour surmonter le scepticisme de la clientèle et les craintes du personnel quant aux éventuelles suppressions d’emploi. Une étude de Gartner a révélé que 64 % des clients préféreraient que les entreprises n’utilisent pas l’IA pour leur service à la clientèle, principalement de crainte qu’il devienne plus difficile de communiquer avec un humain lorsque nécessaire. Les dirigeants peuvent contrer ces préoccupations en ciblant une meilleure prise de décisions humaines et en maintenant un solide cadre de gouvernance.

Fondamentalement, la fusion des services financiers avec d’autres secteurs d’activités est une question d’intégration de la gestion des finances au cœur des activités quotidiennes et des besoins des consommateurs. Les grandes sociétés technologiques gagnent du terrain non seulement avec les services de crédit et d’investissement, mais aussi avec les portefeuilles numériques. Cette méthode de paiement privilégiée dans le monde représente désormais plus de 50 % du commerce électronique mondial. Par ailleurs, les fournisseurs de services financiers pénètrent le marché technologique en transformant leur propriété intellectuelle en produits numériques, tout comme l’ont fait CapitalOne et DTCC. Ils créent également de nouvelles sources de revenus en s’intégrant dans le processus opérationnel des écosystèmes de services plus généraux pour simplifier et automatiser la circulation de l’argent entre les plateformes. Par exemple, les banques collaborent avec les payeurs de soins de santé pour faciliter les remboursements aux patients, en automatisant des milliers de transactions quotidiennes.

Les systèmes de paiement sont particulièrement vulnérables aux inefficiences qui passent sous le radar jusqu’à ce qu’elles commencent à affecter le bilan. Slalom a fourni à de nombreux types d’organisation des vérifications de l’état de santé du cycle de vie des paiements, permettant généralement d’augmenter de 10 à 100 fois le rendement sur l’investissement et de créer de nouvelles opportunités. En exploitant leurs investissements majeurs dans les infrastructures en technologie et la conformité réglementaire, les institutions financières peuvent devenir des catalyseurs essentiels des chaînes d’approvisionnement financières complexes dans tous les secteurs.

Or, l’effacement des frontières entre les secteurs comporte aussi des risques majeurs. Pour développer ses activités dans de nouveaux secteurs comme les soins de santé, les sociétés doivent se frayer un chemin dans des contextes réglementaires complexes et assurer des mécanismes de conformité robustes. Le potentiel d’infractions réglementaires est élevé, spécialement lors du traitement des données financières sensibles et de la circulation de grandes sommes d’argent au-delà des frontières ou entre les entités. De plus, les faillites bancaires un peu partout dans le système — comme celle largement publicisée de Synapse — peuvent exposer les organisations à des risques juridiques et à des atteintes à la réputation.

Les dirigeants doivent évaluer de façon stratégique comment et où élargir leur modèle d’affaires au-delà des offres de service traditionnelles. Les institutions se démarqueront réellement dans leur façon d’équilibrer l’innovation et le risque. Celles qui réussiront auront sans doute investi fortement dans les technologies, la conformité réglementaire et les partenariats intersectoriels, tout en maintenant une approche centrée sur le client qui priorise la confiance et la sécurité.

La Réserve fédérale américaine et d’autres banques centrales à l’échelle mondiale sont entrées en période de recalibrage à la suite des hausses rapides des taux en 2022 et 2023. En septembre 2024, la Réserve fédérale américaine a réduit ses taux pour la première fois depuis le début de la pandémie de COVID-19. La plupart des prédictions laissent présager de nouvelles baisses en 2025, mais une certaine volatilité demeure fort probable puisque les banques centrales gèrent la reprise économique en parallèle avec une éventuelle pression du côté politique et des marchés mondiaux.

Les politiques de taux d’intérêt et les facteurs géopolitiques mondiaux, comme les tensions commerciales internationales, influenceront également les marchés des capitaux et la confiance des investisseurs. Dans le passé, les faibles taux d’intérêt ont mené à une augmentation des emprunts, particulièrement du côté du crédit à la consommation et des prêts hypothécaires. Ce sont de bonnes nouvelles pour les banques, puisqu’il s’agit là d’une occasion pour elles d’accroître ces activités, d’améliorer la liquidité et de réduire la pression sur les bilans. Le véritable défi repose sur la vitesse à laquelle les taux vont changer. Celles qui parviendront à ajuster rapidement leurs stratégies de prêt, leurs modèles d’établissement des prix et leurs offres de produits seront mieux positionnées pour surmonter les transitions en cours.

Les compagnies d’assurance, en revanche, devront relever des défis du point de vue des investissements puisque les taux d’intérêt à long terme baissent. Elles qui, traditionnellement, bénéficient des rendements élevés sur les obligations du Trésor à long terme, pourraient devoir chercher plus loin pour obtenir des rendements. Cela pourrait les inciter à se tourner vers des classes d’actifs plus risquées dans l’espoir de maintenir une rentabilité et d’assurer des rendements adéquats pour les titulaires de police. Le rééquilibrage des portefeuilles et la gestion du risque de duration seront au cœur des priorités en 2025.

Pour les investisseurs, les plus faibles coûts d’emprunt découlant des baisses de taux inciteront sans doute à la tenue de premiers appels publics à l’épargne et de nouvelles transactions, car les entreprises voudront profiter des capitaux à moindre coût. Le vent a tourné depuis la position plus prudente des dernières années, lorsque les taux élevés décourageaient les emprunts et les investissements.

Dans le secteur des paiements, les taux ne seront probablement ni assez hauts ni assez bas pour affecter sérieusement le secteur. Cela dit, les réductions de taux ont tendance à être étroitement corrélées avec un changement global d’état d’esprit et de stratégie auparavant marqués par l’attente et privilégiant désormais une attitude plus fonceuse.